L’anchor investor, ou l’investisseur majeur, sera une pièce maitresse dans votre stratégie de levée de fonds. En s’engageant financièrement, peut-être même au-delà, il donnera une force de traction à votre fonds susceptible de faciliter votre levée de fonds.

En principe, les investisseurs ne veulent pas être trop exposés sur un même fonds. Les fonds d’investissement servent avant tout à mettre en commun des moyens financiers d’une diversité d’investisseurs, afin de diluer leurs risques et multiplier les prises de participation. L’investisseur choisit de placer son argent dans un fonds, plutôt que d’investir seul. Il ne veut donc pas être l’unique ou même le principal investisseur du fonds. Dépasser un taux d’emprise de 10% marque déjà une prise de risque importante pour un investisseur. Rares seront les investisseurs à vouloir franchir ce seuil.

Non seulement, il fait confiance au manager pour prendre de meilleures décisions, mais il s’attend aussi à ne représenter qu’une fraction des fonds investis. Si un investisseur n’avait voulu que profiter des compétences d’un manager, il aurait conclu avec ce manager un contrat de gestion. Son choix d’un fonds d’investissement repose aussi sur la mutualisation des moyens financiers.

Dans les plus grands fonds, le taux d’emprise médian est bien en-dessous de 1%. Ces fonds accueillent parfois des centaines d’investisseurs. Le manager aurait pourtant intérêt à obtenir des montants investis plus importants par investisseur. Le temps et l’argent alloués à la levée de fonds seraient bien moindres. Si son fonds ne comptait qu’une dizaine, ou quelques dizaines d’investisseurs, la levée de fonds donc le déploiement serait plus rapide.

En convainquant leurs investisseurs à investir plus, l’objectif de levée peut être plus facilement atteint. A défaut d’obtenir des montants plus importants par investisseur, ils peuvent se concentrer sur un investisseur majeur, celui-ci pourrait aller jusqu’à devenir l’anchor investor.

Cet investisseur ira à contresens de la logique d’investissement des autres investisseurs. La mutualisation et sa propre dilution ne seront pas des arguments déterminants pour lui. Il prend un risque inhabituel en exposant son argent à un seul fonds. Si le fonds ne tient pas ses promesses, il pourrait perdre des sommes importantes.

Le manager devra convaincre son anchor investor autrement : parce que cet investisseur se démarque de la cohorte des investisseurs au bénéfice du manager, ce dernier peut lui accorder des avantages dont les autres investisseurs ne bénéficieront pas (board seat, diminution des managements fee, parts de carry, opportunité de co-investissement, opportunité de secondaires…).

Lorsque SoftBank Vision Fund a levé 100 milliards pour le plus grand fonds venture de l’histoire, son anchor investor n’était autre que le prince d’Arabie Saoudite. Celui-ci lui a versé 45 milliards, soit 45% des montants totaux engagés. Finaliser la levée de fonds aura été un jeu d’enfant avec une telle contribution.

En effet, l’investissement important de l’anchor investor aidera le manager à convaincre les autres investisseurs. Ceux-ci seront rassurés sur leur dilution, étant donné les sommes déjà levées. Ils n’ont plus à craindre d’être trop investis dans un fonds qui n’atteint pas ses objectifs. De plus, cette prise de risque inhabituelle crédibilise la stratégie du manager. Si un investisseur est prêt à prendre tant de risques, les plus petits peuvent investir en tout tranquillité.

L’anchor investor doit être un acteur avec des poches profondes. Il peut s’agir d’une banque, d’un assureur ou, pour les plus petits fonds, des family office ou des individus fortunés. En principe, les fonds de fonds ne pourront pas jouer ce rôle, dans la mesure où ils ont des ratios à respecter, le respect d’une faible emprise est important pour eux.